jeudi, mai 05, 2005

Something I can never have

Tu n'avais pas saisi tout de suite que c'était jour férié.
Depuis le temps qu'ils s'enchaînent sans autres repères qu'une machine humaine à mettre en route sans destination, sans but, sans justification...
Et puis le tabac qui vient à manquer, et puis le rideau de fer baissé de ton dealer favori.
Il faut chercher, aller plus loin que les 400 mètres de périmètre qui sont devenus ton enclos de louve apeurée et agoraphobe.
Petite bruine fraîche sur rues désertées, plafond bas d'un gris perle que tu t'entraînes à ne pas trouver menaçant.
Méthode Coué.
Tu les as, tes deux paquets d'Amsterdammer blond et ton paquet de Rizla+ Original...

Et là, au sortir du bar-tabac enfumé où tu as failli te mettre à hurler de terreur parce que deux ou trois piliers avinés entonnaient faux des chants basques antédiluviens et que ton cher silence t'avait paru menacé de mort par des nervis armés de coutelas de chasse, tu retrouves la rue parfaitement déserte.
Idée saugrenue.
En profiter pour s'aventurer plus loin...

Il y avait le CD de "And all that could have been" de Nine Inch Nails dans le lecteur.
Tu as roulé au hasard dans la ville, t'arrêtant à des feux rouges où nulle voiture ne te faisait face ni ne te croisait.
Juste le ruban de bitume brillant de goutelettes diaprées sous tes yeux. Personne. Personne. Personne.
Ta ville comme le Malevil atomisé de Robert Merle.
Tu es la seule survivante d'un monde haïssable qui n'a eu que ce qu'il méritait.
Tu réfléchis... Tu as ta tente, ton hamac, ton cerf-volant de combat, ta canne ferrée de randonnée, ta boussole et tes bouteilles d'eau dans le coffre. Comme toujours.
Tout va bien.
Tu respires...
Tu roules, tu roules, tu roules...
Mais pourquoi les feux rouges continuent-ils de fonctionner puisque c'est la fin du monde ?

Et là, tu te réveilles. Personne n'a appuyé sur le bouton rouge.
Rentrer. Vite.
C'était trop beau.
Rentrer. Grimper tes escaliers quatre à quatre. Refermer la porte. Ton lit, par terre, et l'oreiller que tu serres convulsivement contre tes yeux.
Mais toujours la voix de Trent Reznor dans ta tête qui te murmure :

I still recall the taste of your tears
Echoing your voice just like the ringing in my ears
My favorite dreams of you still wash ashore
Scraping through my head 'till i don't want to sleep anymore
EDIT du 06/05/2005 : Il y a longtemps, j'avais la video et le fichier audio d'une espèce de MTV Unplugged de Nine Inch Nails, aka Trent Reznor, piano de concert et basse acoustique, pièce aux plafonds hauts et moulurés, bougies ambrées et voiles de lin volant au vent d'une nuit à Chicago dont la magie était tellement prégnante qu'on ne pouvait en détacher ses yeux... Je les ai perdu au gré des caprices d'un PC qui avait décidé de mourir de colapsus impromptus...
Heureusement, j'ai au moins réussi à récupérer le fichier audio.
Cette version de "Something I can never have", iconoclastiquement, je la place au même niveau que le "Nessum dorma" de Di Stephano ou le "Liebestod" de Kirsten Flagstaad... eh oui !
Même les variations piano d'Arcadi Volodos sur le Cendrillon de mon Sergei Prokofiev que si j'avais un Dieu, ce serait lui....

Et je l'ai retrouvé !
Alors je vous l'offre...




Aucun commentaire: