mercredi, mai 04, 2005

Je suis un mensonge qui dit la vérité

Psyché : Bonjour, père de moi, c'est fille de toi. Tu vas bien ?
Georges : Salut, ma poulette. Ça va comme un vieux... (.. c'est mal parti...)
Psyché : Tu dis ça à chaque fois.(... ça part définitivement mal...)
Georges : C'est chaque fois plus vrai. (... c'est bien ce que je pensais...)
Psyché : Mais pour moi aussi, Papa ! Pour tout le monde, enfin !!! (... plus minable comme dénégation, on fait pas trop...)
Georges : Quand on y est vraiment, ça n'a plus le même sens. De toutes façons, je suis le seul champ d'application où ta lucidité est dangereusement défaillante. (... et allez donc... une couche de compliment sur les multiples couches de désespérance...)
Psyché : Même pas vrai. (... dit-elle en mentant comme un arracheur de dents...)
Georges : Allons-donc ! Tu n'as jamais su mentir ! (... 1 point pour toi...)
Psyché : ... (... "glups", fait-elle...)
Georges : Ah ! Tu vois ! (... Papa ! Arrête !)
Psyché : Je ne vois rien du tout, c'est le fil du téléphone qui vient de s'entortiller autour de Joey ! (...même pas vrai...)
Georges : Tiens ! Elle va comment ta serpillière à poils longs ? (... je sais qu'il s'en fout royalement mais qu'il veut juste me sauver la mise...)
Psyché : Elle va comme un truc à poils longs, c'est-à-dire qu'elle en perd partout et que j'aime pas passer l'aspirateur (... de l'art d'attraper les perches qu'on vous tend avec amour...)
Georges : Qu'est-ce que tu lis en ce moment ? (... seconde bouée de sauvetage pour fille en fragments qui se noie...)
Psyché : (... soulagée...) Un truc terrible ! "Les YesMen ou comment démasquer l'imposture néolibérale", ce sont deux activistes américains, génies de la guérilla-communication, qui passent leur temps à ridiculiser les grandes institutions économiques et financières. Là, c'est comment ils se sont fait passer pour deux membres de l'OMC et se sont fait acclamer au sommet de Seattle avec les propositions les plus délirantes qui soient... à mourir de rire !
Georges : Te presse pas... je passe avant...
Psyché : ... (...là, c'est sûr, il va mal pour retomber dans le morbide dont j'exige d'être la seule spécialiste dans la famille...)
Georges : Et ils sont parus où tes zouaves ? (... il a senti le "blanc" et se rachète illico...)
Psyché : A la Découverte. Je te le prêterai.
Dis ? Tu ne t'es pas trop crevé au jardin ? Avec ce beau temps, je suis sûre que tu as passé ton temps dehors ! (... il ne niera pas... c'est l'évidence !...)
Georges : Ça va. Mais tu vois, j'étais bien content que la pluie revienne aujourd'hui. Ça me fait une excuse pour ne pas constater qu'il me faut un quart-d'heure pour me relever... (... Tu m'emmerdes à pointer les signes précurseurs de la fin... Est-ce que je le fais, moi ?...)
Psyché : Ça date pas d'hier ! Tu as toujours été raide comme une planche à repasser ! (... c'est vrai mais je sens que ça ne sera pas suffisant...)
Georges : Pas pareil. Avant la machine marchait mal, maintenant, elle ne marche plus. (... et voilà ! J'avais raison !...)
Psyché : Tu veux que je vienne te donner un coup de main ? Ça serait plus drôle à deux (... tu la prends ma perche, dis, Papa ? Allez ! Prends-la !...)
Georges : Avec plaisir, ma chérie ! Tu essaieras de me faire voter "non", j'essaierai de te faire voter "oui", ça nous fera faire une chouette gymnastique intellectuelle tout en dérouillant nos muscles... (...Yo ! On va se régaler !...)
Psyché : D'ac' ! A la première éclaircie, j'arrive ! (... et comment ! Ventre à terre, oui !...)
... /...

"Ces incessantes et phosphorescentes traînées de la mort sur soi que nous lisons dans les yeux de ceux qui nous aiment sans désirer les leur dissimuler".
René Char

Amertume dans la bouche.
Goût de sang. Yeux noyés.
La partie que nous jouons, tous les deux, devient de plus en plus périlleuse, de plus en plus compliquée, de plus en plus délicate dans la balance entre s'aimer vrai et se mentir par amour.
La trame de la toile devient de plus en plus transparente, usée jusqu'à la corde.
Mais aucun des deux ne veut vraiment céder.
Désespérés, nous continuons nos deux conversations en parallèle : celle qu'on entend et celle du non-dit.

Mais celle du non-dit est de moins en moins dissimulée.
Nos silences et nos regards la hurlent.

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