Elle m'est revenue ce matin.
C'était le panneau routier à l'entrée du pôle hospitalier.
"Hôpital, silence".
Gros, le panneau. Très gros. On ne peut pas le rater.
Et moi qui tourne indéfiniment autour de cette notion de silence qui recouvre tant de choses diverses, pardoxales ou contradictoires, ce panneau-là, je l'ai trouvé effrayant.
Comme une injonction, comme un baillonnement.
"Ici, on sait. On sait ce dont vous souffrez, on sait ce que vous avez, on sait ce qui est bon pour vous... alors taisez-vous. Vous n'avez plus voix au chapitre."
Lieu sans espoir de parole possible.
Loi du silence qui vous retire vos droits d'être humain pensant, parlant, désirant.
C'est étrange autant qu'inquiétant, finalement, de se rendre compte que toutes les expressions qui imagent ou décrivent l'arrêt du silence sont des expressions construites autour de verbes marquant la violence, l'intrusion, la rupture : rompre le silence, déchirer le silence, trouer le silence, percer le silence, briser le silence, un silence à couper au couteau... comme si le moment où cesse le silence ne peut être qu'intensité, rebellion, mouvement.
Alors que quand le silence est là, les expressions se construisent autour de sa matérialité et de sa toute-puissance que l'on ne questionne même plus. Comme s'il avait un poids, une forme, une épaisseur, une légitimité de notable. Garder le silence, observer le silence, passer quelque chose sous silence, la loi du silence.
On dirait un roi olympien dans ses nuages. Une immanence.
Et moi, là-dedans ?
Pourquoi est-ce que je fonctionne à l'envers ?
Pourquoi ai-je transformé le "non" radical en silence ?
Comment en suis-je arrivée à faire du silence, mon insoumission, le noyau-même de l'intensité du refus (oui, je sais... "on" peut aussi dire que c'est du déni de réalité, "on" n'aura pas tort, mais "on" ne sera pas gentil... et je peux mordre, encore... Grrrroooaaarrrrr....) ?
Du coup, je suis allée marcher pour réfléchir... en silence, justement.
Rien de tel que la randonnée pour l'accueillir en soi, ce satané silence. Comme un compagnon de ballade.
Et je confirme du coup ce que j'avais dit dans une note précédente : les Pyrénées sont diantrement plus belles quand elles sont en feu par la grâce des feuillages à l'agonie.
La preuve !...
Hêtraie en Vallée d'Ossau
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