Une de plus.
Chaque fois que tu prends la parole, que tu "écris" la parole, tu te voues à n'être que ce que tu es, ou plutôt à te retrouver honteusement identifiée à ce que tu n'es pas, te sentant toujours à côté et au-delà de ce que tu peux livrer de toi dans la parole ou l'écriture.
Terrible enfermement.
Figure d'aliénation.
Délicieuse et répugnante fiction d'un vrai toi.
Toi sans contours, sans noyau, sans essence, sans substance.
Toi dans ce flou, ce nuage, cette nébuleuse, insoutenable et poétique incertitude.
Mais néanmoins à l'abri de tout leurre, de toute confusion.
Le silence, c'est le champ libre à l'exigence, à l'intuition, au pressentiment d'une vérité qui toujours se dérobe à toi, toujours s'éloigne.
Tous les feux du désir et de l'espoir.
Nuées de l'intériorité.
Carence et paresse, orgueil infini qui te pousse à t'enfermer en ces nuées.
Parler, écrire, c'est consentir aux limites que tu abhorres, au prix d'une inévitable mutilation.
Mutilation, amputation, limitation, c'est le prix à payer pour que tu sois audible.
Alors quelques jeux de poignards, en regard, qu'est-ce que c'est ?
Juste une expression logique, à peine décalée.
Tout ton désir de vie, de plus de vie, de plus de vivante vie ne trouve plus à s'exprimer que dans le désir et l'acte de la mort, symbolique ou réelle, trop lente à venir et que tu te sens poussée à provoquer constamment.
Petits plongeons, bras tendu, ta lame au bout des doigts comme un aiguillon.
"Sommeil sur la plaie, pareil à du sel"
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